jeudi 15 septembre 2022

BRIGANDAGES EN BÉARN EN 1776

Les années 1775 et 1776 furent malheureuses en tout genre par les pertes du bétail, par la dépense des gens de guerre, par la cherté des grains et par les brigandages. Il s’éleva un essaim de voleurs en Béarn et dans toutes les contrées voisines, qui pillaient et ravageaient tout: Les églises étaient volées. Il y eut plus de quatre vingt églises en Béarn de pillées en ces deux années. Beaucoup de maisons forcées et pillées, des passants arrêtés, de même que des presbytères volés. On entrait pistolet à la main. Et pendant que quelques-uns de ces brigands pillaient les maisons, les autres arrêtaient les maîtres au lit, pistolet à la main; ces brigandages se démontrèrent plus manifestement au mois de Septembre 4776, après que le fameux La Montagne, insigne voleur d'églises et capitaine de cette bande, fut exécuté à Pau et ensuite brûlé. Ce fut alors que ces malheureux firent plus de ravages ; La Montagne en avait dénoncé une troupe de la ville de Pau, entr'autres le nommé Audijos, maître en fait d’armes, Perrein, orfèvre, et sa femme, et plusieurs autres mauvais garnements des environs qui s’évadèrent. Ce fut encore dans le Vicbilh que ces brigands firent plus de ravage ; ils pillèrent plusieurs maisons dans la ville de Conchez. La demoiselle Blandin du lieu d'Aubous eut le malheur d'être volée le 5 octobre. Cette troupe de brigands s'introduisit dans la maison ayant escaladé le toit qu'ils percèrent. Ils pillèrent aussi dans ce lieu plusieurs autres maisons, de sorte que le peuple tremblait d'être assailli de nuit et de jour. Les officiers municipaux portèrent plainte au procureur général, qui en fit part au Parlement, requérant d’y pourvoir. La Cour rendit un arrêt de règlement qui ordonne aux jurats des lieux de tenir la main à la sûreté publique, ordre de dresser procédure des délits et de les remettre aux procureurs desparsans pour en informer ; leur ordonne d'arrêter tous les vagabonds et gens sans aveu, et de faire sonner le tocsin, si besoin est, ordonne aux habitants de se rendre au lieu judicial pour recevoir les ordres des dits officiers et en cas de refus d’être arrêtés comme complices, et fauteurs des vols et brigandages ; fait défenses aux dits habitants de loger aucun étranger sans prendre son nom, qualité et domicile et de le déclarer à l'instant à un officier municipal du lieu dont il fera acte de la déclaration sur un autre registre à cet effet destiné et la faire signer du déclarant ; et s’il ne sait signer, il fera mention du refus, à peine contre les dilayants de demeurer responsables en leur propre et privé nom des délits qui pourraient être commis dans les lieux ou aux environs. L'arrêt est du 10 octobre 1776, en chambre des vacations, et fut envoyé à toutes les communautés, imprimé et publié. Cette compagnie de brigands était fort nombreuse. On la faisait monter à trois ou quatre cents, aux environs de Pau, Morlaàs et au Vic-bilh, et aux quartiers d'Oloron, Sauveterre, Orthez et Sallies. Ce qui fait que les voyageurs n’étaient pas en sûreté. Ce fut en cette même année qu'un capucin conventuel, à Oloron, quitta le froc et le couvent, le cinq ou le six octobre 1776 pendant la nuit, et s'associa avec une demoiselle de la ville pour s'en aller à Genève pour soulager les aiguillons de la chair, et se marier à Genève. Ils arrivèrent à l'auberge Beler à Rébenac, où ils louèrent une voiture à raison de douze livres par lieue pour aller plus vite avec la belle capucine ; cette évasion fit du bruit et causa du scandale dans la ville. En cette année, M. Douet de la Boulaye, intendant, rendit une ordonnance du 6 juin 1776, qui défend de tuer des veaux et génisses dans les provinces de Béarn, Navarre et généralité d’Auch, à peine de trois cens livres et de confiscation de la viande au profit des hôpitaux, jusqu'à ce qu'il plaise au Roy de permettre le repeuplement des bestiaux dans les dites provinces, se réservant d'accorder des permissions particulières en faveur des hôpitaux et des malades sur les certificats des médecins. Elle fut affichée et publiée en Béarn le 23 juin de la dite année.

Source: Bulletin de la Société des sciences, lettres et arts de Pau, 1 janvier 1910, p178-179

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