vendredi 12 février 2016

Histoire

LM. DE SALLES A LA REINE DE NAVARRE.

Je ne say par quel moyen comanser, Madame, se bilhet, car en iceluy ne soroys escripre chose qui vous peut estre agreable. Les afayres de des sont en tel estat que de quatre pars les troys vous ont torné le dos, les ungs overtement, les autres cauvertement, desquels à la fin nous esperons moins. Voyant qu'il estoit nescesayre descouvrir se que l'on crainhoit de vostre ville de Oleron, l'on fut d'abis que si l'on voyoit la chose deplorer, sesaysir de la personne du sieur Desgarabaque (1). Estant en seste deliberation, l'on entant nôvelles que les capitene Gulhem et de Armendaris (2) estoint entrés par la vallée d'Aspe, estoient passés par Arete, maison du capitene Bonasse (3), qui leur avoit fait grant ghere; alant et venant, ils ont saccagé beaucoup de maisons de ceux de la Religion. Le sieur de Arros et une bonne trope partismes pour nous en aler à Navarrenx, ou le dit -Desgarabaque fut appelé, feignant que Palu (4), vostre valet de chambre, lui portoit quelque bilhet de Vostre Magesté; lequel vint, aveques des prinsipaux mutins de Oleron. L'on luy remonstre la faute qu'il avoit fityte de ce qu'il avoit laisé paser par son parsan (a) qu'il failhoit savoir comme sela estoit aie (6). Et pour se que le sieur d'Arros deliberoit aler à Oleron, il dit que (1) Jacques de Sainte-Colomme ou Sainte-Colombe, seigneur d'Esgoarmbaque, marié en premières noces à Catherine de Montbrun, puis a Gratianne de Navailles Saint-Saudens. Quoique catholique, )e gouvernement de la villed'Oloron lui avait été confié. n'estoit beshoin et qu'il y donneroit ordre. Finalement fut arresté que l'on iroit luy, s'en volut aler devant l'on luy contredit. Il luy eschape quelques motz et à d'autres de sa companhie, qui fut cause que l'on se resolut de le arester et ses gens qui estoint venus aveques luy et incontinant l'on iroit essayer de entrer dans Oleron, que nos trovasmes bien probude. La porte fut refusée, finalement combatu longuement; il en fut tué dix et huict des nostres et aussi beaucoup autres, dont le fUhs du sieur de Las (1) fut l'ung. A la pointe du jour, le capitene Bonase, le sieur de Las, les enfans Desgarabaque (2) bien accompanhés se rendirent dans la ville toute la nuit le touquesin sona les vals de Baretous, de Josbat et d'Aspe (3) se assemblerent et se retirerent dedans avec Supersantis (4) et Tasta (5). Incontinent le sieur de Luxe, le capitaine Gulhem, Alfrede et Rubré, avecques sine ou six cens basques, aribarent là. Led. Esgarabaque prometoit tout jours fayre randre la place, ce que n'a peu, car il luy a esté rcspondu par ses enfans que ung bel morir toute la vie honore (6). Le sieur de Crament nous est venu trober pour moyenner ausi la redition de la plase, se que n'a peu obtenir. L'on a du ains de laisser aler ceux qui estoint en la companhie Desgarabaque
avecques promesse qu'ils feroint beaucoup pour vostre service et luy, a esté baillié au sieur de Gramont, qui verra s'il en peut tirer quelque chose. Tout en ung mesme. temps, les anemis, qui avoient circuy vostre païs, sont entrés, les ungs par Montaner et Pontac, qui jusques à present ont resisté; les autres, comme le sieur de Peyre (1) et Goas (2), par Lembeye et Conchés, qu'ils ont saquagé. L'on pourvoit en se que l'on peut a vostre ville de Navarreux. L'on se craint fort que les bons ne soint forsés par les meschans. L'on fait toute diligense de mètre estrangés dedans et persone de la religion pour nous en asurer. L'on a si grant faute d'argent que l'on a eu à toucher à vostre baiselle. Je vous asure que si vous n'y proboyés de à nous secourir par quelques moyens, que vostre pays est pardu et en doubte de vostre ville, laquelle sera defandue par les bons au peril de leur vye. L'on a tele faute de gens, que à grant peyne arrivet-on a la moytié de se que faut pour vostre ville. Nous somes en mesme doubte de celuy que vous soupesonés (3). Toutes foys par nesessité nous somes constrains fayre se que faysons. L'on a despeché Mons' Desperien expressément pour plus particulierement vous fayre le resit de nostre nesesité, lequel vous supplions nous renvoyer pour estre assurés par luy de se que povés fayre pour nous et se que aviserés de nous, qui despanderons nous vies pour vostre servisse.
SALES.
De Navarrenx, le 4 de abril 1569.

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